Vielleicht

Une enquête dans le quartier de Wedding sur les fantômes de la colonisation dans l’espace urbain contemporain...

Dans l'« Afrikanisches Viertel », le quartier populaire de Berlin où vivent aujourd’hui de nombreux·es africain·e·s, trois rues portent le nom de colonisateurs allemands de sinistre mémoire. Cédric Djedje, acteur genevois d'origine ivoirienne, enquête sur les ambiguïtés de la mémoire coloniale. Il en revient avec un spectacle entre autobiographie, témoignages et fiction… et l'étrange sentiment d'avoir été entraîné dans une abyssale faille de l'Histoire. Que se passera-t-il lorsque les noms de ces rues changeront ?

Comment s’attache-t-on à un espace ? Comment l’histoire coloniale résonne-t-elle avec cet attachement ? Obnubilé·e·s par ces questions, Safi Martin Yé chercheuse-performeuse et Cédric Djedje artiste, retracent pour nous leurs déambulations dans le « quartier africain » de Berlin. Dans ce lieu rôdent encore les fantômes des colonisateurs allemands honorés par des noms de rue. Y résonnent aussi les nombreuses voix de militant·e·x·s pour la rebaptisation de ces rues, voix que Cédric à recueillies lors d’une résidence de recherche. De nouveaux noms ouvrent nos oreilles à des récits enfouis, celui de Cornelius Fredericks (capitaine Nama ayant résisté contre les troupes coloniales allemandes), de la famille Manga Bell (activistes pacifistes au Cameroun), d’Anna Mugunda (figure de la communauté herero dans la lutte namibienne contre l’apartheid) ou encore Maji Maji (mouvement de résistance d’Afrique de l’Est). Leurs noms viendront peut-être remplacer ceux des trois colonisateurs-fondateurs de colonies allemandes en Afrique mais des recours judiciaires bloquent la rebaptisation. Que faire durant ce moment de suspension ? Safi et Cédric choisissent de tisser la trame du futur par l’emmêlement de récits, mais aussi par l’invention de rituels qui honorent les luttes anticoloniales passées et présentes. Il et elle se racontent aussi, cherchant leur place dans des espaces urbains européens au sein desquels leurs corps noirs semblent continuer de faire tâche. Et peut-être alors se dessine un rêve : une fête d’inauguration des nouveaux toponymes dans quelques mois ou années, le jour où le changement sera entériné.

Texte de présentation par la compagnie