Juan Martinez « le refus du miroir » Ce que l’on connaît, ce que l’on cache.
L’œuvre de Juan Martinez recèle de nombreuses énigmes propres à stimuler notre réflexion.
Au fond de la salle, une grande peinture, des bandes horizontales aux tonalités bleu cobalt, violet, un filet rose ; un tracé blanc pour des profils qui tourbillonnent, nymphes, esprits, mémoires
du fond de l’eau peut-être.
Décoratif, beau, le fond du propos est souvent inquiétant, voire cruel, il déstabilise parfois le visiteur : silhouette recouverte d’un voile à l’instar d’un fantôme ou visage caché à demi derrière un grillage, esquissé volontairement naïf, blanc, cerné d’un bleu royal sur fond noir, d’où émerge cette oreille tendue démesurément.
Plus loin, on est surpris par une fréquence vibratoire : celle de la transformation et de l’instabilité des images qui naissent avec le mouvement. Des ondes linéaires forment ici un filtre dans cette œuvre intitulée « nageur » On cligne des yeux pour voir apparaître ou disparaître un corps schématisé.
Dans « Tao o Dao » les lignes suggèrent la taille d’un corps qui s’anime.
Là, telles un nuage, les ondes linéaires, soutiennent un amas de têtes ou d’esturgeons; au bas de la toile, elles suggèrent le flux d’un courant qui passe.
Dans ce parcours étrange on remarque l’aspect tragi-comique de cette tête, clown blanc surmonté d’un pourtour rouge lequel pourrait en être le dédoublement, un masque virtuel qui semble tirer la langue.
On retient aussi trois ovales empilés verticalement pour dire un corps. Cette œuvre par son côté charnel et maternel aurait tendance à rassurer, n’étaient-ce le noir et les yeux barricadés plutôt menaçants.
Nouveauté : la peinture en aplat sur panneau de bois découpé, bientôt la sculpture ?
Une toile centrale, un personnage qui sort du cadre, prenant corps sur son support de bois et, de l’autre côté, la moitié du visage peint sur la toile prolongé par sa moitié complémentaire , évidée pour ne laisser qu’une bande contour et un œil en demi-lune, fermé.
Si le tracé est très présent dans l’ensemble de l’exposition, c’est la couleur qui prévaut dans la déclinaison d’une nature morte « les trois darnes » : une vingtaine de petits formats où le peintre fait la part belle aux couleurs. Le motif, le fond, l’encadrement peint lui aussi sur le bord du carton sont traités avec la même intensité. On se régale.
Au final une grande peinture grise, où des formes connues, mais non identifiées à la limite de la figuration et de l’abstraction relatives à l’animal, à l’humain, au végétal et à la géométrie composent le codex de l’artiste.
Transformer la tragédie, élaborer un langage qui nous permette de prendre du recul, apporter de la poésie, tel est son crédo.