J'attends toujours
1758, année charnière pour le théâtre et la littérature. Diderot échange avec la comédienne Marie-Jeanne Riccoboni. De quoi parlent-ils ? De théâtre, de théâtre et encore de théâtre. Mais le désaccord est complet ...
"Savez-vous quels sont les tableaux qui m’appellent sans cesse ? Ceux qui m’offrent le spectacle d’un grand mouvement ? Point du tout, mais ceux où les figures tranquilles me semblent prêtes à se mouvoir. J’attends toujours." | Diderot (Lettre à Marie-Jeanne Riccoboni, 27 novembre 1758)
1758, la guerre de 7 ans fait rage depuis plus de deux ans. Une année charnière pour le théâtre et la littérature.
Que font les écrivains pendant que les pioupious s’étripent ? Ils écrivent. Pas pour oublier, mais parce qu’ils savent - ils pressentent - que les règles dominantes, les règles du jeu social et politique, sont finissantes. Ils écrivent pour en trouver de nouvelles, découvrir de nouvelles relations et de nouvelles façons de les représenter.
Diderot échange avec la comédienne Marie-Jeanne Riccoboni : il lui envoie ses textes, elle lui écrit une lettre, il lui répond. De quoi parlent-ils ? De théâtre, de théâtre et encore de théâtre. Les relations de séduction importent peu ici, la querelle est frontale et porte sur des points très techniques : position des corps, déplacements, regards, pose de la voix, agencement du décor, place du mobilier, rythmes, temps. Le désaccord est complet.
Nous suivrons Diderot dans ce cheminement, ses tâtonnements et ses réflexions nourris par sa dispute avec la comédienne. Et serons les témoins de ce moment inaugural où le théâtre – et le monde avec lui – bascule, s’annule et s’invente.